L’expulsion par les autorités algériennes de plus de 1200 subsahariens continue de susciter l’indignation et des condamnations de la part d’ONGs travers le monde.

L’ONG  « Horizons sans frontières » (HSF) dénonce à Dakar un geste qualifié de « honte pour l’Afrique », et  appelle à une harmonisation des politiques migratoires ».

« Les images relayées par la presse du monde entier sur la situation de détresse de migrants en Algérie ne font pas honneur au continent africain, au moment où l’Europe s’érige en forteresse », souligne le président de l’ONG, Boubacar Seye, dans un communiqué rendu public à Dakar.

« Le quotidien de ces migrants, pour la plupart subsahariens, vacille entre xénophobie, racisme et expulsions menaçant ainsi leur sécurité dans ce contexte géopolitique très tendu », poursuit la même source, relevant que la montée du racisme dans les grandes villes comme Alger et Oran risque de créer l’effet domino sur toute l’étendue du pays.

En 2014, rappelle M. Seye, certains médias algériens, à l’instar du quotidien +Al Fajr+ parlaient déjà d’envahissement par « ces milliers d’africains qui envahissent les rues de la capitale ».

Le 12 mai de la même année, le journal +Echourouk+ accusait, dans ses colonnes, les migrants de transmettre des maladies infectieuses aux Algériens, alors que le journal +Al Fadjr+ enfonçait le clou en accusant les subsahariens de « propager les épidémies comme le Sida et la maladie à virus Ebola ».

« On peut dire, sans risque de se tromper, qu’il s’agit véritablement de violations des droits humains notamment des articles 3 et 5 de la déclaration universelle des droits de l’Homme », note HSF, qui tient à interpeller la communauté internationale sur le sort de ces migrants « en situation de détresse, de vulnérabilité et de soumission en Algérie ».

Par ailleurs, l’ONG appelle à la responsabilité, au sens de l’honneur, au respect de la dignité humaine et à une harmonisation des politiques migratoires en Afrique pour un développement humain durable, conclut le communiqué.

Pour sa part, la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH) a dénoncé l’arrestation « musclée » des centaines de migrants subsahariens en perspective de leur expulsion.

L’ONG estime à 1400 le nombre de migrants subsahariens arrêtés dans la capitale algérienne en moins d’une semaine et placés dans des camps de rétention à Alger ou emmenés à Tamanrasset (extrême sud) pour leur expulsion.

La Ligue relève également que ces arrestations musclées n’ont pas épargné les étrangers en situation régulière sur le sol algérien et n’ont été suivies d’aucune explication de la part des autorités, déplorant également de voir ces interpellations prendre des allures de « rafle ».

Dans la foulée de cette chasse à ces migrants, un haut responsable algérien a accusé les ressortissants des pays subsahariens de propager la maladie du sida dans son pays.

Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’Homme (CNCPPDH) et avocat du pouvoir, ira jusqu’à dire à un journal local que « ces maladies sont considérées comme quelque chose d’habituelle et de normale par cette communauté ».

Quant au journal Le Monde, il revient sur les propos scabreux à l’endroit des migrants subsahariens de Farouk Ksentini, avocat algérien et président de la très officielle « Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’homme ».

Les propos de Ksentini stigmatisant les migrants subsahariens ont provoqué l’indignation sur les réseaux sociaux, souligne le journal, en rappelant que ce présumé défenseur officiel des droits de l’homme en Algérie a expliqué dans une interview au quotidien arabophone Essawt El Akher, que « la présence des migrants et des réfugiés africains dans plusieurs localités du pays peut causer des problèmes aux Algériens », en affirmant que cette présence expose les Algériens « au risque de la propagation du sida ainsi que d’autres maladies sexuellement transmissibles ».

Le journal français a également indiqué que l’avocat a « encouragé les autorités à expulser les migrants africains, pour arrêter cette catastrophe qui nous est imposée ».

« Les propos de M. Ksentini ont d’autant plus choqué qu’ils interviennent dans un contexte de vives tensions vis-à-vis des migrants subsahariens vivant en Algérie », note le journal, rappelant les affrontements qui ont éclaté, fin novembre dernier dans le quartier de Dely-Brahim, en périphérie d’Alger, entre riverains et étrangers et les rafles menées les 1er et 2 décembre, où plusieurs centaines de migrants (1.400 personnes – hommes, femmes et enfants) ont, selon la Ligue algérienne des droits de l’homme), été envoyés par bus à Tamanrasset, à l’extrême sud, d’où certains ont commencé à être expulsés, mercredi 7 décembre.

Le quotidien « Le Monde » a relevé, pour sa part, que de nombreux observateurs ont, en tout cas, fait remarquer que ces rafles « avaient eu lieu à la veille de l’ouverture du premier Forum africain d’investissements et d’affaires d’Alger, censé resserrer les liens avec les États d’Afrique subsaharienne ».